Miriam Daher
Tu me fuis, belle Étoile, Étoile du retour !
Toi, que mon cœur brisé cherchait avec amour,
Tu quittes l’horizon qu’obscurcit un nuage,
Tu disparais du ciel, tu fuis devant l’orage.
Depuis des ans, pourtant, partout je te cherchais !
Les yeux fixés sur toi, j’espérais… je marchais.
Comme un phare brillant d’une lumière amie,
De ton espoir lointain, s’illuminait ma vie ;
J’avançais à ton jour, tu m’indiquais le port ;
Pour arriver vers toi, je redoublais d’effort.
De chacun de mes pas je comptais la distance,
Je disais : « C’est une heure ôtée à la souffrance ;
C’est une heure de moins, entre ce sombre jour
Et le jour radieux qui verra son retour ! »
Étoile d’espérance, appui d’une pauvre âme,
Pourquoi lui ravis-tu ta lumineuse flamme ?
Mon vol s’est arrêté dans ces obscurs déserts,
Mon aile vainement s’agite dans les airs ;
La nuit règne partout. — Sans lumière et sans guide,
En vain, vers l’Orient, de mon regard avide
J’appelle le soleil, qui chaque jour y luit…
Le soleil ne doit pas se lever aujourd’hui !
J’attends, et tour à tour ou je tremble ou j’espère.
Le vent souffle du ciel ou souffle de la terre ;
Il m’emporte à son gré dans son cours tortueux :
Ainsi, tourbillonnant, une feuille légère
Passe d’un noir ravin au calme azur des cieux.
Comme aux buissons l’agneau laisse un peu de sa laine,
Mon âme fatiguée, en sa course incertaine,
À force de douleurs perd l’espoir et la foi,
Et ne sait plus, mon Dieu, lever les yeux vers toi.
Étoile du retour, dissipe les orages !
Toi que j’ai tant priée, écarte les nuages !
Reviens à l’horizon me rendre le bonheur,
Et, du ciel où tu luis à côté du Seigneur,
Fais descendre, le soir, un rayon d’espérance
Sur les cœurs pleins d’amour que déchire l’absence !
J’aimerais te voir même un instant,
Pour que quand je t’embrasse s’arrête le temps …
Pour sentir ton odeur et ton toucher …
J’aimerais réentendre ta voix,
Et pour ton dialecte unique je vois
Ton sourire dans lequel tu plonge dans des rêves sans fin …
J’aime voir tes yeux brillants, indescriptibles dans les mots.
J’aimerais te voir, t’embrasser de mes mains
Et d’un cœur timide, j’aimerais pour toujours entendre ta voix parler…
Petite étoile, au sein des vastes cieux,
Toi que suivaient et mon cœur et mes yeux,
Toi dont j’aimais la lumière timide,
Où t’en vas-tu dans ta course rapide ?
Ah ! j’espérais que, dans ce ciel d’azur,
Du moins pour toi le repos était sûr.
Pourquoi t’enfuir, mon étoile chérie ?
Pourquoi quitter le ciel de ma patrie ?
Mon cœur connut le bonheur et l’amour :
Amour, bonheur, tout n’a duré qu’un jour.
Près d’un ami, je cherchais l’espérance…
Et mon ami m’oublia dans l’absence !
Le cœur brisé, j’aimais encore les fleurs,
Quand je les vis se faner sous mes pleurs ;
Au ciel alors, pour n’être plus trahie,
J’avais aimé…. l’étoile qui m’oublie !
Adieux à toi, belle étoile du soir !
Adieux à toi, toi, mon dernier espoir !…
Errante au ciel comme moi sur la terre,
En d’autres lieux va briller ta lumière.
Rien n’est constant pour moi que la douleur,
Rien ici-bas n’a voulu de mon cœur ;
Autour de moi, tout est sombre et se voile,
Et tout me fuit… même au ciel, une étoile !
Reviens, reviens, ma bien-aimée ,comme une fleur loin du soleil,
La fleur de ma vie est fermée, loin de ton sourire vermeil.
Entre nos cœurs tant de distance,tant d’espace entre nos baisers !
Ô sort amer ! Ô dure absence !Ô grands désirs inapaisés !
D’ici là-bas, que de campagnes,que de villes et de hameaux,
Que de vallons et de montagnes,à lasser le pied des chevaux !
Au pays qui me prend mon étoile,hélas ! Si je pouvais aller ;
Et si mon corps avait une aile, comme mon âme pour voler !
Par-dessus les vertes collines, les montagnes au front d’azur,
Les champs rayés et les ravines, j’irais d’un vol rapide et sûr.
Le corps ne suit pas la pensée; pour moi, mon âme, va tout droit,
Comme une colombe blessée, s’abattre au rebord de son toit.
Et dis, mon âme, à cette astre :« Tu sais bien qu’elle compte les jours,
Reviens, reviens, détruis les frontières, reviens pour toujours.
Brises cette absence,redonnes espoir a l’attente, rends lui son estime, sa confiance
Peut-être retrouvera-t-elle , sa force ,sa valeur, son sourire un jour! »